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mardi 27 septembre 2016

J’ai testé le site internet de campagne électorale de François Hollande

Aujourd’hui, des sympathisants ont mis en ligne un site à la gloire de l’actuel président français, baptisé « notre idée de la France ».

Ce media clame « oui ça va mieux » et nous invite à le vérifier, chiffres à l’appui, département par département.
Les résultats pour l’Isère, où je réside, sont, pour le moins, maigrelets.

Extrait du site « notre idée de la France »

Chômage

« 611 créations nettes d’emplois depuis 2012 »
La population active de l’Isère avoisine 800 000 personnes.
Le gouvernement en place a donc accru l’emploi en 5 ans dans une proportion de 1 pour 1 300.
Mon professeur de physique de terminale aurait qualifié cet exploit d’épaisseur du trait.

Jeunesse

« 1 171 jeunes ont bénéficié d’un emploi d’avenir »
La phrase complète n’étant pas très claire, il est difficile de déterminer si cette valeur se rapporte à la seule année 2015 ou à l’ensemble du mandat présidentiel.
Le trait a bien grossi, un jeune isérois sur 200 est concerné.

Enseignement

« 1 304 postes créés depuis 2012 dans l’académie de Grenoble »
Le territoire départemental étant un peu étriqué, il a été étendu à l’académie, c’est à dire à 4 autres départements limitrophes.
Le trait devient poutre. Les effectifs de l’Éducation Nationale ont augmenté de 2% en 5 ans !

Entreprises

« 2 562 entreprises sont soutenues par BPI France », la banque publique d’investissement.
La poutre se confirme à 2% des sociétés dauphinoises.

Retraites

« 8 972 retraités ont bénéficié d’un départ anticipé depuis 2012 »
Le compteur s’emballe à 3.5% des pensionnés isérois !

Impôts

« 174 618 foyers ont bénéficié d’une baisse d’impôt sur le revenu en 2015 »
Cette fois, le match se joue presque à guichets fermés. Près d’un ménage sur trois a été moins ponctionné par les percepteurs de l’Isère l’an dernier.
Il manque toutefois la statistique des augmentations de prélèvements obligatoires de 2012 à 2016.

Supporter une équipe reléguable ressemble parfois à un sacerdoce.

Factuellement votre

Références et compléments
L’image et les citations sont issues du site « notre idée de la France » le mardi 27 septembre 2016 vers 18 heures.

Les valeurs ayant permis l’étalonnage des données hollandaises proviennent de l’INSEE et de l’Académie de Grenoble.

mardi 9 août 2016

Le revenu de base universel en 6 questions

​Le revenu d'existence ou revenu de base universel fait petit à petit son chemin dans les débats sociaux, économiques et politiques.

En 2016, la Suisse a organisé un référendum à son sujet et la Finlande annoncé une prochaine mise en oeuvre expérimentale.

Cette idée mérite, a minima, d'être examinée attentivement.
En effet, un concept promu simultanément par les libéraux et des fractions très différentes de la gauche et combattu par les conservateurs de toutes obédiences ne saurait être entièrement stupide.

Le revenu de base universel c'est quoi donc ?

Le principe est simple : remplacer toutes les prestations sociales existantes par une seule, à la fois forfaitaire et inconditionnelle.

Par exemple, en France, la protection sociale coûte grosso modo 700 milliards d'euros annuels pour une population de 65 millions d'habitants.
Cela représente sensiblement 900 € mensuels par personne.

Le revenu universel consisterait à verser cette somme automatiquement à chacun, sans distinction, du berceau au cercueil.
En contrepartie, toute la couverture sociale actuelle - sécurité sociale maladie, allocations familiales, allocation chômage, pensions de retraite et aides diverses notamment pour le logement - serait supprimée.

Chacun serait entièrement libre de choisir l'usage de cette pension : dépense immédiate et/ou épargne notamment pour la retraite et/ou cotisation à des assurances ou mutuelles garantissant les risques liés à la santé ou à la perte d'emploi.

Des propositions suggèrent, dans un souci de protection de l'enfance, que le revenu de base versé aux mineurs ne puisse être employé que pour leur assurance santé et la constitution d'une épargne disponible à leur majorité.

Le revenu d'existence pour quoi faire ?

Les supporters de cette allocation unique, lorsqu'ils sont issus des rangs de la gauche, apprécient une protection sociale qui deviendrait réellement universelle et totalement égalitaire.
Les plus modernistes soulignent que le revenu de base crée un "droit à l'accès" et non pas un "droit à des droits".

Les libéraux y voient un système associant libre choix individuel avec solidarité collective.
Ils insistent aussi sur la meilleure efficacité économique procurée, d'une part, par la l'extrême simplicité de ce mécanisme social et, d'autre part, par la mise en concurrence des assurances maladie et retraite ouvertes au secteur privé.
D'après eux, le revenu universel ferait disparaître moult usines à gaz et rentes de situation.

De surcroît, certains estiment qu'une telle réforme, en France - par le biais de la suppression des régimes sociaux existants - faciliterait la refonte des prélèvements obligatoires, en les faisant moins porter sur le travail et plus sur la valeur ajoutée, voire sur les revenus.

Le revenu universel : une prime à la fainéantise ?

Cet argument est aussi ancien que les premiers embryons de protection sociale.
Depuis plus d'un siècle et demi, les milieux conservateurs l'ont brandi à chaque fois qu'une solidarité collective organisée est venue substituer une aléatoire charité.

En pratique, une somme inférieure au salaire minimum ne permet guère de mener une existence de nabab tout en bénéficiant d'une couverture santé acceptable.
Je suggère à ceux qui pensent le contraire de pratiquer l'exercice pendant quelques semaines.

Toutefois, d'autres objections éthiques et pratiques au revenu de base s'avèrent plus problématiques.


Faut-il soigner un malade non assuré ?

Avec le revenu universel, la collectivité mettrait à disposition de chacun la possibilité de se protéger contre les principaux accidents de la vie, mais sans aucun caractère obligatoire.

Rapidement après la mise en place du revenu de base, les hôpitaux devraient recevoir des patients souffrant d'affections graves et n'ayant pas employé leur allocation universelle pour assurer leur santé.
Sans possibilité d'acquitter le coût de leur traitement, devront-ils être quand même pris en charge ?

L'éthique de la médecine prescrit de soigner les personnes le nécessitant indépendamment de leur condition pécuniaire.

Toutefois, dans ce cas, beaucoup d'entre nous - en suivant un raisonnement économique rationnel - se comporteront en passagers clandestins obtenant des prestations médicales gratuites.
Les infirmières et médecins ne vivant pas de l'air du temps, le système de santé ne pourra survivre longtemps sans financement...

Dans la même veine, une liberté complète des assurances maladie conduira à d'importantes inégalités, à l'instar de celles existant aujourd'hui pour les risques automobiles.
Un trentenaire non fumeur, sportif, marié avec enfants se verra proposer des primes modiques, alors que le revenu de base d'un septuagénaire isolé, cardiaque et diabétique ne lui permettra pas de s'assurer.

Pour éviter ces effets pervers, des promoteurs du revenu d'existence suggèrent de le transformer en "chèque-protection sociale" à l'instar des "tickets-restaurant" et d'imposer des régulations strictes aux assurances maladie privées.
Les libéraux craignent, non sans raison, le retour des usines à gaz et des rentes de situation...

Faut-il payer un revenu de base aux immigrés ? aux expatriés ?

Le revenu d'existence serait financé par la fiscalité nationale qui taxe, en proportions diverses selon les états, salaires, bénéfices, valeur ajoutée, travail et patrimoine.

Son versement aux personnes vivant durablement dans un pays - quelle que soit leur nationalité - et en règle avec la législation, notamment fiscale, ne pose aucun problème de principe.

Par contre, cette allocation universelle doit-elle être donnée aux arrivants de fraîche date ?
Que faire s'ils sont en situation irrégulière ?
Comment éviter l'afflux des "chasseurs de prime" ?
900 € mensuels inconditionnels apparaissent depuis beaucoup de pays en voie de développement, voire émergents, comme un pactole...

De même, les nationaux vivant à l'étranger sont imposés là où ils habitent. Logiquement, ils ne devraient pas bénéficier du revenu de base de leur pays d'origine.
Mais comment limiter la très tentante fraude à la résidence ?

Comment payer la retraite des vieux ?

En France, mais aussi par exemple en Tunisie, en Italie ou en Allemagne, les retraites sont essentiellement financées par un système dit de répartition.
Chaque mois, les cotisations des actifs sont immédiatement employées à payer les retraités.
L'accumulation, au fil de la vie professionnelle, de ces cotisations génère, petit à petit, des droits à la retraite.

Ce système ressemble en apparence à une épargne mais n'en est pas une.
De surcroît, il ne tient que par son caractère obligatoire.
Les pensions de retraite sont garanties par le fait que tous les travailleurs du moment sont forcés de les financer, en échange de la promesse qu'il en sera de même pour eux plus tard.

Dans d'autres pays, comme les USA, les retraites fonctionnent avec des régimes dits de capitalisation.
Chacun épargne ce qu'il souhaite via des organismes financiers, les fameux "fonds de pension".
Ces sommes sont placées en actions et obligations afin de fructifier et d'assurer une rente quand leur titulaire cessera de travailler.

Le revenu universel est bien adapté au système par capitalisation car il confère à chacun une possibilité minimale d'épargne.

Par contre, l'allocation d'existence qui supprime l'obligation individuelle de protection sociale est incompatible avec les retraites par répartition.
Pour les jeunes générations, cela ne serait guère un souci. Les deux systèmes ont leurs avantages et inconvénients et nécessitent chacun du temps long.
Pour les retraités ou pour ceux - comme votre serviteur - qui s'approchent de la fin de leur carrière, le nouveau régime social serait une catastrophe. Leurs longues décennies de cotisations n'ayant pas été employées à bâtir une épargne, le revenu de base les priverait de retraite...

Pour surmonter ces difficultés, des propositions de transition longue d'un système à l'autre, voire même de maintien des retraites par répartition sont évoquées.
Là encore, la pureté virginale du revenu de base universel risque de s'évaporer dans des usines à gaz...

Socialement et universellement votre

Références et compléments
Merci à Jean et Bernard qui ont, depuis plusieurs mois, insisté pour que je rédige ce billet.

samedi 30 novembre 2013

Plaidoyer pour Philippe Varin qui aurait mérité de garder son chapeau

Philippe Varin, présentement futur-ex PDG de la maison automobile Peugeot Citroën, à l'issue d'un lynchage syndicalo-politico-médiatique, a été contraint, cette semaine, de renoncer à une pension dite chapeau que la famille gouvernant l'entreprise s'était engagé à lui verser.

Trop peu de voix se sont élevées pour défendre cet infortuné patron.
Refusant de me joindre au chœur des hyènes, je vais tenter, à ma façon, de plaider la cause de cet éminent polytechnicien en vous proposant de vous mettre dans la peau de Philippe Varin et d'imaginer l'extrême complication de sa vie professionnelle mais aussi personnelle.

En 2009, ayant restructuré et vendu à un conglomérat indien la dernière compagnie sidérurgique européenne indépendante, Philippe Varin est recruté par la tribu Peugeot pour diriger ses fabriques de voitures.
Il prend alors la tête d'une entreprise dans la tourmente dont les pertes avoisinent 1 000 000 000 €.
Très rapidement, son action est couronnée de succès. En 2010 et 2011, les marques au lion ou aux chevrons repassent dans le vert.

Toutefois, le 8 août 2012, franchissant le cap symbolique de la soixantaine, Philippe Varin se met à envisager sa retraite.
Mu par un sens aigu de la moralité et de la probité tout à son honneur, il se met en ordre de bataille pour rendre la société à ses actionnaires dans l'état où il l'avait trouvé en y arrivant : en déficit !
Compétiteur dans l'âme et perfectionniste compulsif, ce PDG réussit même à exploser la pâle performance de son prédécesseur et termine l'année avec un trou total de 5 000 000 000 €, 25 000 € par salarié.
Creuser aussi rapidement et aussi profondément suppose une activité hors pair, un excellente agilité intellectuelle et une mobilisation de tous les instants.
Au regard de tous ces efforts, le salaire annuel de 1 300 000 € de Philippe Varin me parait plus qu'amplement justifié. Les critiques de ce type de rémunération méconnaissent l'ampleur des défis auxquels sont confrontés les dirigeants des grands groupes.

Malheureusement pour eux, les top managers ne doivent pas se contenter d'exploits professionnels. Leurs trop rares moments de loisirs ne leur appartiennent guère.
Recevoir une rémunération de 3 500 € par jour, dimanches et jours fériés inclus, est aisé. La dépenser est une autre paire de manches !

Prenons quelques instants la place de ce pauvre Philippe Varin, chaque soir vers 22 heures, après une journée harassante consacrée à imaginer comment fermer usines ou services et faire racheter sa boîte par des chinois sans qu'Arnaud Montebourg et les Peugeot y trouvent à redire.
Au lieu de nous affaler dans notre canapé et de siroter une camomille au Canderel en regardant un épisode du commissaire Navarro récupéré sur YouTube, nous voilà forcé de planifier comment, le lendemain, notre famille et nous-même allons pouvoir claquer plus de trois SMIC mensuels et demi avant le coucher du soleil. Cette tâche est d'autant plus ardue que notre contrat de travail nous interdit l'achat de BMW, Porsche et autres Rolls-Royce et que notre entreprise finance l'essentiel de nos repas, voyages et hébergements.

Au bord du burnout, Philippe Varin aurait confié cette semaine à ses confrères du MEDEF qu'il avait accueilli la hollandaise et arlésienne taxe à 75% avec soulagement et qu'il regrettait même son taux bien trop faible et sa mise tardive en application.

Richement votre.

Références et compléments
- Voir aussi les chroniques "hôpital Montebourg vs charité PSA ?"  et "face au CAC, le SMIC prend une claque !".
Le billet "les constructeurs automobiles devraient cesser de faire des voitures" revient sur la méforme actuelle des constructeurs automobiles français.

- Mes remerciements chaleureux et amicaux aux deux détonateurs de cette chronique consacrée aux malheurs des riches, Alain et Jean, très élégant dans sa nouvelle nuisette.

- Les chiffres, arrondis pour faciliter la compréhension, sont issus des rapports financiers officiels de la maison PSA Peugeot Citroën.

- D'après Wikipedia, Philippe Varin serait né le 8 août 1952 à Reims.
  

dimanche 30 juin 2013

Tout savoir (ou presque) sur le déficit public de la France

La série de chroniques sur les finances de la France se poursuit.
Nous allons, dans ce billet, examiner le déficit et les dettes de l'état et des autres collectivités publiques, c'est à dire le déséquilibre entre les dépenses et les recettes passées précédemment en revue.

En 2012, comme sensiblement en 2011, en sus des grosso modo 900 milliards d'Euros d'impôts, taxes et autres prélèvements réputés obligatoires, la puissance publique française a réussi à garnir ses caisses d'une centaine de milliards supplémentaires de recettes diverses et mal définies.
Notre machine étatique reçoit donc annuellement autour de 1 000 milliards, environ 1 300  € par mois et par français.

Toutefois, dans le même temps, les dépenses de ces mêmes collectivités publiques excèdent les recettes et avoisinent 1 100 milliards, 1 400 € mensuels par personne.

Aussi, tous comptes faits, chaque mois, état, sécurité sociale, municipalités, départements et régions se liguent pour être à découvert - le vocable financier correct est déficit - de 100 € par français.
Lorsque la puissance publique récolte 10 €, elle se débrouille pour illico en dépenser presque 11 !

Le déficit public de la France est l'écart entre les dépenses de l'ensemble des collectivités publiques et leurs recettes (principalement impôts, taxes et cotisations sociales).
Les organismes publics creusent, chaque année, un trou de 100 milliards d'Euros que des emprunts, joliment nommés dettes publiques, comblent tant bien que mal.
A partir de fin novembre, impôts et cotisations ne suffisent plus à subvenir aux besoins de l'état. En décembre, l'ensemble des fonctionnaires, tous statut confondus, mais aussi les médecins, les infirmières ou les ambulanciers, dont la sécurité sociale assure l'essentiel des revenus, sont rémunérés exclusivement par des prêts.

Comme nous sommes collectivement à découvert chaque année depuis 1980, la dette des organismes publics n'a fait que s'alourdir avec les passages successifs à l'Elysée de François Mitterrand, Jacques Chirac, Nicolas Sarkozy et François Hollande.
Elle culmine désormais à 1 600 milliards d'Euros, c'est à dire une pile de billets de 20 € allant de Paris à Bombay. Au fil des ans, nos gouvernements ont gagé 25 000 € sur la tête de chacun d'entre nous.
Deux ans d'impôts et de taxes, c'est à dire deux ans de SMIC par personne, seraient nécessaires pour rembourser ce montant astronomique.

Les emprunts contractés par l'état et ses filiales ne sont malheureusement pas gratuits et conduisent à une spirale délétère. Les intérêts payés sur la dette publique atteignent 40 € mensuels par français, un gros tiers de notre déficit !
Si nos dépenses publiques ne retrouvent pas rapidement la voie de l'équilibre avec les recettes, la France entrera en situation d'hyper-endettement , à l'instar de la Grèce, de Chypre ou du Portugal.

Nous évoquons, dans la chronique suivante, les voies difficiles mais possibles qu'il nous faudrait parcourir pour éviter le sort funeste de nos voisins hellènes ou lusitaniens.

Déficitiquement votre

Références et compléments
Cette chronique, sous une forme légèrement remaniée, fait désormais partie du recueil disponible en ligne "Humeurs Économiques".

- Voir aussi les trois autres volets de cette série de chroniques économiques :
"Tout ce que vous avez toujours voulu savoir sur les dépenses publiques françaises"
. "Tout ce que vous avez toujours voulu savoir sur les impôts et les taxes en France"
"Tout ce que vous avez toujours voulu savoir sur les pistes de sortie de crise"

- Les chiffres de cette chronique et des deux précédentes, que les spécialistes qualifient joliment de consolidés, ont été obtenus par recoupement et recalcul de données présentées dans divers documents officiels en provenance des ministères des finances et du budget, de l'INSEE, du parlement, de la sécurité sociale et de la cour des comptes.
Les valeurs ont été volontairement arrondies pour plus de lisibilité.

dimanche 23 juin 2013

Tout savoir (ou presque) sur les dépenses publiques françaises

En France, grosso modo, la moitié de notre travail et de notre consommation est régie par l'état et les collectivités publiques.
De ce fait, dépenses publiques, modes d'imposition et déficit national trustent, à juste titre, le débat économique.

Malheureusement, ces nécessaires échanges ne sont ni démocratiques ni étayés et débouchent sur des choix hasardeux.
En effet, malgré de multiples recherches parmi les publications des corps constitués et des organismes officiels, je n'ai pas réussi à trouver de présentation claire et unifiée des finances publiques françaises.
La puissance publique, en France, telle une divinité hindoue, est une créature à quatre bras : l'état, la sécurité sociale, les collectivités locales et, pour finir, une pile hétéroclite d'organismes divers plaisamment baptisée ODAC par les technocrates. Chacune de ces branches est jalouse de ses prérogatives et se garde bien d’harmoniser ses comptes avec ses collègues.
Aiguillonné par de fidèles lecteurs de ce blog, je me suis, en amateur et au risque des approximations, attelé à cette tâche.
En voici le premier volet consacré aux dépenses.


En 2011, dernière année pour laquelle des statistiques pas trop tartes sont disponibles, les dépenses publiques françaises, toutes catégories confondues, ont dépassé le montant colossal de 1 100 milliards d’Euros.
Si cette somme avait été intégralement payée en billets de 20 €, l'épaisseur cumulée aurait atteint 5 000 km, la distance séparant Paris de Dubaï.
En moyenne par personne, ce montant avoisine 1 450 € par mois, soit près de 6 000 € mensuels pour un foyer de 2 parents et 2 enfants.
Les débours annuels des organismes publics et sociaux équivalent à 56% du travail de tous les français, notre production de janvier à fin juillet.

Les dépenses sociales se taillent la part du lion avec la moitié du total, 750 € mensuels par français. Notre labeur de janvier à mi-avril est affecté à la solidarité entre citoyens.
Sensiblement 400 € sont consacrés aux prestations de tous ordres et 350 € aux retraites. La couverture maladie représente 200 € par mois et par malade en puissance, les allocations familiales 50 € et l’indemnisation du chômage 35 €.

Environ 250 € mensuels par tête de pipe - le travail national de mi-avril à fin mai - rémunèrent des employés publics, toutes catégories confondues, un quart de l'ensemble du coût salarial de tous les français.
Avec 100 € par mois et par personne, les collectivités locales sont le premier employeur public. L'état et la sécurité sociale suivent avec chacun 75 € mensuels.

De fin mai à fin juin, la France travaille pour alimenter des subventions et transferts très variés, aux contours parfois flous et aux destinations pas toujours contrôlées. Chacun d'entre nous engloutit mensuellement 200 €, 15% des dépenses publiques, dans ce trou noir mal défini.

La première moitié de juillet est consacrée aux achats et aux investissements des organismes publics pour environ 200 € par français et par mois.
De quoi relativiser l’importance des chantiers le long des routes qui arborent des pancartes proclamant fièrement « l'Etat investit pour votre avenir ».

Enfin, de notre Fête Nationale au 23 juillet, nous travaillons pour rembourser les intérêts des différentes dettes publiques, 40 € par personne et par mois.

Dépenses publiques françaises : moyennes mensuelles par personne
Au regard des dépenses publiques, les priorités affichées par les politiques successifs de droite et de gauche n'en sont pas réellement.
En moyenne par français, seuls 120 € mensuels par personne, 8% des dépenses publiques, sont dirigés vers le système éducatif dans son ensemble, autant que le montant des subventions et transferts.
De même, police et justice ne consomment que 2% du gâteau, 30 € par mois et par coupable potentiel, autant que les militaires.
Les frais de fonctionnement des organismes de sécurité sociale sont à peine moins coûteux que les missions d'enseignement et de sécurité intérieure réunies !

Les collectivités locales - communes, départements et régions - sont atteintes par la fièvre de l'or.
Ramenées à la production nationale, les dépenses décidées par les élus dits de terrain se sont accrues de plus d'un tiers en moins de vingt ans pour atteindre 300 € par français et par mois.
Un dixième de notre travail est consommé par des structures de proximité, à commencer par les municipalités qui culminent à 170 € mensuels par administré.

En guise de conclusion, je vous invite, pour mieux appréhender l'énormité des sommes en jeu, à effectuer une simulation familiale des dépenses publiques.
La moyenne par personne de 1 450 € mensuels signifie que chaque heure qui passe, jour comme nuit, semaine comme week-end, été comme hiver, l'état français et ses filiales claquent  2 € pour chacun d'entre nous.
Aussi, je vous suggère de prendre un grand récipient et d'y déposer, toutes les 60 minutes, autant de fois 2 € en pièces de monnaie que des personnes vivant dans votre foyer, en n'oubliant pas de rattraper les périodes de nuit et d'absence du domicile ...

Publiquo-financièrement votre

Références et compléments
Cette chronique, sous une forme légèrement remaniée, fait désormais partie du recueil disponible en ligne "Humeurs Économiques".

- Voir aussi les trois autres volets de cette série de chroniques économiques :
"Tout ce que vous avez toujours voulu savoir sur les impôts et taxes en France"
. "Tout ce que vous avez toujours voulu savoir sur le déficit public de la France"
. "Tout ce que vous avez toujours voulu savoir sur les pistes de sortie de crise"

- Les chiffres de cette chronique, que les spécialistes qualifient bizarrement de consolidés, ont été obtenus par recoupement et recalcul de données présentées dans divers documents officiels en provenance des ministères des finances et du budget, de l'INSEE, du parlement, de la sécurité sociale et de la cour des comptes. Les valeurs ont volontairement été arrondies pour plus de lisibilité.

- Le document de très loin le plus utile, malgré ses incohérences et son manque de focalisation sur les montants les plus importants, a été le "rapport sur la dépense publique et son évolution" de 2012 établi par le ministère du budget pour préparer le projet de loi de finances de 2013.

mercredi 14 novembre 2012

Les veuves de prêtres catholiques financées par l'état laïque français

Les mœurs et mentalités religieuses en France, fille aînée de l'Église et république laïque, évoluent à la vitesse de la marée au Mont Saint-Michel.

Ainsi, la décision rendue aujourd'hui par le tribunal administratif de Strasbourg obligeant l'état, c'est à dire nos impôts, à payer, en vertu du principe d'égalité, une pension de réversion à Hélène B., veuve d'un regretté prêtre catholique alsacien trop tôt soustrait à l'affection des siens.

Cet arrêt induit d'intéressantes questions.
En voici un petit aperçu, non limitatif :

- Le veuf d'un rabbin mosellan aura-t-il droit, lui aussi, à une pension de réversion financée sur fonds publics ?

- Une personne ayant débuté sa carrière professionnelle comme pasteur dans le Bas-Rhin (secteur public) et qui, suite à une crise de foi, serait devenue imam dans l'Ariège (secteur privé) peut-elle cumuler ses points de retraite ?

- Les enfants d'un prêtre haut-rhinois décédé écrasé par une cloche durant une messe deviennent-ils pupilles de la Nation ?

- L'alcoolisme et l'allergie à la farine sont-elles reconnues comme maladies professionnelles chez les prêtres et pasteurs ?

- La retraite effectuée par un curé dans un monastère se déduit-elle de celle, très maigre, que la sécurité sociale lui servira à la fin de son apostolat ?

- Un ministre du culte peut-il être aussi député ?

- Le fait que les popes, les chamanes et les bonzes d'Alsace-Moselle ne puissent exercer leur profession sous la tutelle apaisante du statut de la fonction publique ne constitue-t-il pas une rupture grave du principe d'égalité ?

- Les agnostiques français ont-ils le droit à l'objection de conscience ? C'est à dire cesser de financer les clergés de l'est de la France !

Religioso-déficitairement votre !

Références & compléments
- Cette chronique a été inspirée par un article du journal La Croix du 14 novembre 2012, désormais non accessible, relatant la décision judiciaire sur la pension de réversion pour la veuve d'un prêtre catholique.
Dans les faits, un curé alsacien, au moment où il a fait valoir ses droits à une retraite méritée de fonctionnaire, en a profité pour rompre ses voeux et se marier ... civilement.
Après quelques années de vie conjugale officielle, cet ex-prêtre, rappelé auprès de son ancien employeur, a passé l'arme à gauche.
L'état a, au premier abord, refusé de verser la retraite à son épouse pourtant légitime. Celle-ci a finalement obtenu gain de cause au Conseil d'État.

- Les cultes catholiques, protestants et juifs d'Alsace-Moselle bénéficient toujours d'un régime concordataire.
Leurs prêtres, pasteurs et rabbins sont payés par l'état et possèdent le statut de fonctionnaire.
La raison de cette bizarrerie régionaliste est que la séparation des églises et de l'état a eu lieu en France en 1905 alors que l'Alsace-Moselle faisait partie de l'empire allemand. Lorsque ces territoires ont été réintégrés à la France en 1918, ils ont conservé le concordat qui n'avait pas été aboli ainsi que de nombreuses particularités légales locales.

- Voir aussi la chronique "Tentative d'explication de la laïcité française à mes amis hors de l'Hexagone"