dimanche 23 juin 2013

Tout savoir (ou presque) sur les dépenses publiques françaises

En France, grosso modo, la moitié de notre travail et de notre consommation est régie par l'état et les collectivités publiques.
De ce fait, dépenses publiques, modes d'imposition et déficit national trustent, à juste titre, le débat économique.

Malheureusement, ces nécessaires échanges ne sont ni démocratiques ni étayés et débouchent sur des choix hasardeux.
En effet, malgré de multiples recherches parmi les publications des corps constitués et des organismes officiels, je n'ai pas réussi à trouver de présentation claire et unifiée des finances publiques françaises.
La puissance publique, en France, telle une divinité hindoue, est une créature à quatre bras : l'état, la sécurité sociale, les collectivités locales et, pour finir, une pile hétéroclite d'organismes divers plaisamment baptisée ODAC par les technocrates. Chacune de ces branches est jalouse de ses prérogatives et se garde bien d’harmoniser ses comptes avec ses collègues.
Aiguillonné par de fidèles lecteurs de ce blog, je me suis, en amateur et au risque des approximations, attelé à cette tâche.
En voici le premier volet consacré aux dépenses.


En 2011, dernière année pour laquelle des statistiques pas trop tartes sont disponibles, les dépenses publiques françaises, toutes catégories confondues, ont dépassé le montant colossal de 1 100 milliards d’Euros.
Si cette somme avait été intégralement payée en billets de 20 €, l'épaisseur cumulée aurait atteint 5 000 km, la distance séparant Paris de Dubaï.
En moyenne par personne, ce montant avoisine 1 450 € par mois, soit près de 6 000 € mensuels pour un foyer de 2 parents et 2 enfants.
Les débours annuels des organismes publics et sociaux équivalent à 56% du travail de tous les français, notre production de janvier à fin juillet.

Les dépenses sociales se taillent la part du lion avec la moitié du total, 750 € mensuels par français. Notre labeur de janvier à mi-avril est affecté à la solidarité entre citoyens.
Sensiblement 400 € sont consacrés aux prestations de tous ordres et 350 € aux retraites. La couverture maladie représente 200 € par mois et par malade en puissance, les allocations familiales 50 € et l’indemnisation du chômage 35 €.

Environ 250 € mensuels par tête de pipe - le travail national de mi-avril à fin mai - rémunèrent des employés publics, toutes catégories confondues, un quart de l'ensemble du coût salarial de tous les français.
Avec 100 € par mois et par personne, les collectivités locales sont le premier employeur public. L'état et la sécurité sociale suivent avec chacun 75 € mensuels.

De fin mai à fin juin, la France travaille pour alimenter des subventions et transferts très variés, aux contours parfois flous et aux destinations pas toujours contrôlées. Chacun d'entre nous engloutit mensuellement 200 €, 15% des dépenses publiques, dans ce trou noir mal défini.

La première moitié de juillet est consacrée aux achats et aux investissements des organismes publics pour environ 200 € par français et par mois.
De quoi relativiser l’importance des chantiers le long des routes qui arborent des pancartes proclamant fièrement « l'Etat investit pour votre avenir ».

Enfin, de notre Fête Nationale au 23 juillet, nous travaillons pour rembourser les intérêts des différentes dettes publiques, 40 € par personne et par mois.

Dépenses publiques françaises : moyennes mensuelles par personne
Au regard des dépenses publiques, les priorités affichées par les politiques successifs de droite et de gauche n'en sont pas réellement.
En moyenne par français, seuls 120 € mensuels par personne, 8% des dépenses publiques, sont dirigés vers le système éducatif dans son ensemble, autant que le montant des subventions et transferts.
De même, police et justice ne consomment que 2% du gâteau, 30 € par mois et par coupable potentiel, autant que les militaires.
Les frais de fonctionnement des organismes de sécurité sociale sont à peine moins coûteux que les missions d'enseignement et de sécurité intérieure réunies !

Les collectivités locales - communes, départements et régions - sont atteintes par la fièvre de l'or.
Ramenées à la production nationale, les dépenses décidées par les élus dits de terrain se sont accrues de plus d'un tiers en moins de vingt ans pour atteindre 300 € par français et par mois.
Un dixième de notre travail est consommé par des structures de proximité, à commencer par les municipalités qui culminent à 170 € mensuels par administré.

En guise de conclusion, je vous invite, pour mieux appréhender l'énormité des sommes en jeu, à effectuer une simulation familiale des dépenses publiques.
La moyenne par personne de 1 450 € mensuels signifie que chaque heure qui passe, jour comme nuit, semaine comme week-end, été comme hiver, l'état français et ses filiales claquent  2 € pour chacun d'entre nous.
Aussi, je vous suggère de prendre un grand récipient et d'y déposer, toutes les 60 minutes, autant de fois 2 € en pièces de monnaie que des personnes vivant dans votre foyer, en n'oubliant pas de rattraper les périodes de nuit et d'absence du domicile ...

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Références et compléments
Cette chronique, sous une forme légèrement remaniée, fait désormais partie du recueil disponible en ligne "Humeurs Économiques".

- Voir aussi les trois autres volets de cette série de chroniques économiques :
"Tout ce que vous avez toujours voulu savoir sur les impôts et taxes en France"
. "Tout ce que vous avez toujours voulu savoir sur le déficit public de la France"
. "Tout ce que vous avez toujours voulu savoir sur les pistes de sortie de crise"

- Les chiffres de cette chronique, que les spécialistes qualifient bizarrement de consolidés, ont été obtenus par recoupement et recalcul de données présentées dans divers documents officiels en provenance des ministères des finances et du budget, de l'INSEE, du parlement, de la sécurité sociale et de la cour des comptes. Les valeurs ont volontairement été arrondies pour plus de lisibilité.

- Le document de très loin le plus utile, malgré ses incohérences et son manque de focalisation sur les montants les plus importants, a été le "rapport sur la dépense publique et son évolution" de 2012 établi par le ministère du budget pour préparer le projet de loi de finances de 2013.