mercredi 21 mars 2012

Ce cheval, quel chameau !

Une quatrième chronique djerbienne où Roland, notre guest star préférée, nous fait partager sa difficulté à maîtriser les quadrupèdes pour touristes.


A Djerba, le promène-couillon n'est pas maritime mais terrestre. Dès l'arrivée à l’hôtel, un "rabatteur" aura tenté de vous inscrire pour une randonnée dans l'ile en carriole hippomobile, à cheval ou en dromadaire …

La balade en dromadaire n'étant pas une proposition fréquente sous nos latitudes européennes, j'ai fini par y succomber.
Une heure à l'aller pour rejoindre le marché de Midoun, une heure sur place à admirer les étals de dattes et à marchander deux paires de babouches et une heure pour le retour, le programme vous semblera alléchant et sans risques. Malgré les propositions de changer d'animal à mi-course, pour passer du dromadaire au cheval, vous insisterez pour garder le fier destrier du désert à l'aller comme au retour, c'est tellement plus typique …

Las, n'est pas méhariste qui veut !
Tout d'abord, lorsque l'animal est agenouillé, la "selle" - à vrai dire le bât - est à la hauteur de l'encolure d'un cheval. L'aide du chamelier (j'ai bien cherché, le vocable dromadairier reste à inventer) est précieuse pour réussir à attraper le pommeau, puis à vous hisser sur le dromadaire pourtant placide.
Ensuite, en l'absence d'étriers, il s'agit de bien s'agripper car le bestiau vous propulse d'abord à 45° de l'horizontale en se mettant sur ses pattes antérieures, puis vous assène une vive accélération verticale lorsqu'il se hisse sur ses pattes arrières.
Et là, son pas alternatif vient rapidement rappeler à vos vagues souvenirs que le dromadaire bat l'amble. Votre postérieur s'agite suivant une courbe décrivant un huit caractéristique. La seule façon de s'adapter à cette allure consiste à laisser votre colonne vertébrale osciller en opposition de phase, sans chercher à crisper ses avant-bras sur le bât. Précisons que cet exercice est déconseillé aux personnes avec des difficultés pour enfiler leurs chaussettes le matin ou ayant été tourmentées par leur nerf sciatique.

De retour, après la visite du marché mise à profit pour négocier avec un des touristes du groupe un échange dromadaire contre cheval, vous montez rasséréné et un rien goguenard sur un noble Pur Sang arabe en laissant aux autres le plaisirs de la méharée.
Plus agréables à chevaucher, ces montures sont toutefois un brin nerveuses. Le hennissement d'un congénère au lointain, le bourdonnement d'un taon ou l'arrivée inopinée d'une mobylette suffisent à leur faire prendre le mors au dents. Votre serviteur désarçonné en a fait l'amère expérience et s'est retrouvé sur le sable.

Moralité : passés cinquante ans, sans ancêtre Touareg ou cow-boy, préférez la calèche !

Camelo-djerbiquement votre

Roland Goutay

Compléments
- Contrairement au cheval qui lève en même temps son antérieur gauche et son postérieur droit, le dromadaire et le chameau lèvent simultanément les deux pattes gauches puis les deux pattes droites. Cette allure s'appelle l'amble. Pour aller plus loin : article Wikipedia sur l'amble.