Loys Bonod, professeur de lettres dans un lycée parisien, a fait le bonheur récent des gazettes en racontant comment il a "piégé le Net pour donner une bonne leçon à ses élèves".
Pendant plusieurs semaines, il a systématiquement posté sur Wikipedia, sur des forums et sur des sites spécialisés en corrigés de devoirs des informations erronées ou fantaisistes sur le célèbre écrivain du dix-septième siècle Charles de Vion d'Alibray.
Ensuite, ses élèves de première ont eu à rédiger un commentaire à propos d'un quatrain de ce poète "bachique et érotique".
Mus par un désintérêt pour "l'épicurisme insouciant et badin" et par une fainéantise certaine, beaucoup de lycéens sont tombés dans le panneau et ont recopié des passages entiers trouvés sur le web dont leur enseignant était l'auteur véritable.
Ce dernier conclut son expérience par des propos désabusés. Selon lui, les élèves manquent de la "maturité nécessaire pour tirer un quelconque profit du numérique" qui d'ailleurs "creuse la tombe de l'école républicaine".
Je comprends l'ire de ce pédagogue. Charles de Vion d'Alibray est un monument de la littérature française. Que de jeunes écervelés, plutôt que de frotter leur matière grise à la pensée féconde d'un spécialiste de la "poésie de cabaret", préfèrent la facilité de Google et de la copie digitale a de quoi énerver.
De nos jours encore, les vers du grand Charles continuent de nous éclairer sur bien des aspects de l'actualité. Vion d'Alibray aurait d'ailleurs, excusez du peu, inspiré Jean Jaurès, le Mahatma Gandhi, François Hollande et le professeur Barnard.
Jugez sur pièces :
- Le dérèglement climatique
Ce professeur, confronté à un métier difficile, a
Bachotiquement votre
Pendant plusieurs semaines, il a systématiquement posté sur Wikipedia, sur des forums et sur des sites spécialisés en corrigés de devoirs des informations erronées ou fantaisistes sur le célèbre écrivain du dix-septième siècle Charles de Vion d'Alibray.
Ensuite, ses élèves de première ont eu à rédiger un commentaire à propos d'un quatrain de ce poète "bachique et érotique".
Mus par un désintérêt pour "l'épicurisme insouciant et badin" et par une fainéantise certaine, beaucoup de lycéens sont tombés dans le panneau et ont recopié des passages entiers trouvés sur le web dont leur enseignant était l'auteur véritable.
Ce dernier conclut son expérience par des propos désabusés. Selon lui, les élèves manquent de la "maturité nécessaire pour tirer un quelconque profit du numérique" qui d'ailleurs "creuse la tombe de l'école républicaine".
Je comprends l'ire de ce pédagogue. Charles de Vion d'Alibray est un monument de la littérature française. Que de jeunes écervelés, plutôt que de frotter leur matière grise à la pensée féconde d'un spécialiste de la "poésie de cabaret", préfèrent la facilité de Google et de la copie digitale a de quoi énerver.
De nos jours encore, les vers du grand Charles continuent de nous éclairer sur bien des aspects de l'actualité. Vion d'Alibray aurait d'ailleurs, excusez du peu, inspiré Jean Jaurès, le Mahatma Gandhi, François Hollande et le professeur Barnard.
Jugez sur pièces :
- Le dérèglement climatique
Maintenant qu'un air doux nous ramene un beau Jour [...]- La lutte contre le fanatisme
Ah si cette saison ne fond enfin ta glace [...]
Ce n'est qu'un vent qui bruit autour de ma maison
N'asservis point ton coeur sous un vil esclavage- La vanité des destins politiques et des campagnes électorales
Et ne demande point chaque jour le trépas
Qu'est enfin un Cesar, et qu'est un Alexandre- Les maladies cardio-vasculaires
Dont les armes ont mis tant de peuples en deuil ? [...]
Cependant il n'en reste après tant de merveilles [...]
Qu'un peu de poudre au vent, et de bruit aux oreilles
Ma pauvre veine en est tarie,- Le pacifisme
Et mon coeur en est consumé
Je ne vais point aux coups exposer ma bedaine [...]- L'exhibitionnisme
Ne me conte donc plus qu'en l'ardeur des combats
On se rend immortel par un noble trépas
Ton corps plus doux que ton esprit- L'accroissement de l'age de départ en retraite
S'exposait hier à ma vue [...]
Et sous le gant qui la couvrit
Ta main m'apparut demi nue [...]
Ton sein poussait hors de ta robe
Mais compte avec tes maux, mais compte avec ton age- Le soutien à la viticulture en danger
Toutefois dans le vin je trouve une raison,Injustement boudées par les éditeurs, les poésies de Charles Vion d'Alibray sont fort heureusement accessibles sur le web où je les ai, à l'instar des lycéens de Loys Bonod, découvert.
Ou, si tu l'aimes mieux, une comparaison [...]
Car, après avoir bu treize ou quatorze coups
Des esprits tournoyant dans notre cervelle ivre
Font que tout semble aussi tourner autour de nous
Ce professeur, confronté à un métier difficile, a
[...] d'un style trop rude exprimé sa douleur.Il faut dire qu'à cause de ses élèves
[...] il n'a ressenti que de dures épinesFinalement
Dont il n'a peu cueillir seulement une fleur.
je ne sais si ces vers sont dignes de mémoire.Mais décidément,
non, je n'approuve point ces superbes Espritsqui, comme Loys Bonod le professeur trolleur, mettent sur piédestal trop haut pour de jeunes lycéens la Littérature, ses Commentaires et ses Dissertations.
Bachotiquement votre
Références et compléments
- Article original de Loys Bonod "Comment j'ai piégé le net pour donner une bonne leçon à mes élèves" (publié sur le site Rue89).
Suite aux remous suscités par la relation de son expérience pédagogique, Loys Bonod a aussi publié un post-scriptum "Retour sur un petit maelström médiatique".
Suite aux remous suscités par la relation de son expérience pédagogique, Loys Bonod a aussi publié un post-scriptum "Retour sur un petit maelström médiatique".
- Les phrases en italiques sont des extraits de poèmes de Charles de Vion d'Alibray trouvés au gré du web. A ce jour, je n'ai pas réussi à déterminer qui en est l'auteur véritable. La plupart d'entre eux proviennent du site de poésie française par Webnet.
- Les citations entre guillemets sont issues de l'article de Wikipedia sur Charles de Vion d'Alibray. Leur véracité et leur validité est laissée à la libre appréciation du lecteur.
L'historique de cet article indique que Wikipedia l'a protégé du "vandalisme volontaire et pédagogique d'un professeur".
L'article mentionne les nombreuses graphies du nom de notre chantre des "joies du vin et de la bonne chère, des plaisirs amoureux et de la vie facile" : Charles de Vion, Charles de Vion d’Alibray, Charles Vion d’Alibray, Charles Dalibray ...
Cet "homme à la vie mal connue" aurait-il, à l'instar de ses oeuvres, plusieurs facettes ?
L'historique de cet article indique que Wikipedia l'a protégé du "vandalisme volontaire et pédagogique d'un professeur".
L'article mentionne les nombreuses graphies du nom de notre chantre des "joies du vin et de la bonne chère, des plaisirs amoureux et de la vie facile" : Charles de Vion, Charles de Vion d’Alibray, Charles Vion d’Alibray, Charles Dalibray ...
Cet "homme à la vie mal connue" aurait-il, à l'instar de ses oeuvres, plusieurs facettes ?
- Mon autre chronique sur le même thème : Dissertations indignées
- Plusieurs très bonnes réactions sur le web à cette expérience pédagogique discutable :
. Superbe synthèse de André Gunthert "Saboter Wikipedia, ou l'école vengée"
. David Monniaux, sur son blog "La vie est mal configurée", a rédigé une critique de l'expérience pédagogique de Loys Bonod dont je recommande la lecture. Elle est intitulée "Un prof trolle ses élèves sur Internet, la belle affaire !".
. Un autre très bon billet sur cette expérience pédagogique "Eduquons à l'esprit critique, pas au mépris du travail es autres" a été publié sur son blog par Rémi Mathis.
. Le billet de Damien Babet "Pourriture pédagogique" (cité par André Gunthert)
- Plusieurs très bonnes réactions sur le web à cette expérience pédagogique discutable :
. Superbe synthèse de André Gunthert "Saboter Wikipedia, ou l'école vengée"
. David Monniaux, sur son blog "La vie est mal configurée", a rédigé une critique de l'expérience pédagogique de Loys Bonod dont je recommande la lecture. Elle est intitulée "Un prof trolle ses élèves sur Internet, la belle affaire !".
. Un autre très bon billet sur cette expérience pédagogique "Eduquons à l'esprit critique, pas au mépris du travail es autres" a été publié sur son blog par Rémi Mathis.
. Le billet de Damien Babet "Pourriture pédagogique" (cité par André Gunthert)