La France agricole n’en finit plus de convulser.
À chaque trimestre sa crise. Dernier épisode en date, le bras de fer entre les producteurs de lait et la multinationale Lactalis dans le nord-ouest.
La fibre paysanne étant encore vivace, les petits fermiers bénéficient de la bienveillance des urbains qui, pourtant, s'ingénient à les couler.
Retour distancié et chiffré sur un thème passionnel.
Cette croissance, ainsi que la réduction de la taille des familles, a nécessité la construction de nombreux logements.
L’essentiel de cette urbanisation toujours vivace - maisons individuelles mais aussi immeubles - s’est faite en périphérie des villes et bourgades sur des terrains jusqu’alors cultivés.
L’auteur de ces lignes ne fait pas exception en la matière. J'habite un quartier de la banlieue de Grenoble qui était entièrement agricole 25 ans en arrière.
Les terres cultivables s'échangent actuellement en Isère autour de 0.7 €/m2, avec des minimas pouvant descendre à 0.1 €/m2 et des maximas vers 1.5 €/m2.
Un mètre carré planté en blé fournit, bon an mal an, 750 grammes de céréales, soit, au cours moyen, de l'ordre de 15 centimes d'euros.
Grosso modo, les champs valent quelques années de moisson.
En dehors de la viticulture, de l'horticulture et de la floriculture, toutes les productions agricoles ont des rendements économiques similaires.
À l'autre bout de l'échelle, dans la même région, les terrains constructibles pour des habitations se négocient en moyenne à 120 €/m2, avec des pointes à 200 €/m2, voire même 700 €/m2, dans les zones recherchées des vallées proches de Grenoble.
Le paysan qui vend un terrain pour le transformer en lotissement réalise donc une plus value entre 15 000% et 100 000%.
Lors de la signature chez le notaire, il engrange d'un coup entre 8 et 30 siècles de récoltes.
Un quart de nos sous va à notre sweet home.
De même, éducation, médias et télécommunications ainsi que loisirs en tous genres s'accaparent un cinquième de notre budget.
Même si la bonne chère tient une place de choix dans nos conversations, en pratique notre nourriture est devenue une portion congrue de notre portefeuille, un gros huitième de ce qu'il en sort chaque mois.
Ces montants réduits sont utilisés surtout pour acheter des aliments transformés et assez peu de productions agricoles de base.
Je vous laisse imaginer ce qu'il peut en être dans les pays ne nourissant pas la passion française pour la bouffe et la boisson.
Seul un changement significatif et durable de nos habitudes personnelles de consommation permettrait de donner structurellement de l'oxygène au monde paysan.
Au delà de notre sympathie campagnarde de façade, sommes-nous prêts à dépenser moins pour notre gîte et plus pour notre couvert ?
À diminuer nos usages d'écrans ?
À lever le pied sur nos loisirs ?
Si - comme je le pratique - notre réponse collective est majoritairement non, alors nous devons cesser de nous lamenter sur les crises agricoles à répétition dont nous sommes les principaux responsables.
Arbi-tragiquement votre
Références et compléments
Voir aussi les chroniques :
- Cochonou vs éleveurs : dans le cochon tout est bon mais tout n’a pas la même valeur
- J'ai tué la librairie Arthaud de Grenoble
Je remercie les participants, qui se reconnaitront, à une récente discussion enflammée sur l'actuelle crise du lait entre paysans et Lactalis. Ce billet est directement issu de cet échange agité.
Outre les toujours très achalandés Wikipedia et INSEE, les chiffres annoncées dans cette chronique proviennent aussi des sites terrain-construction.com, leparticulier.fr et finances.net.
Pour mieux dégager les tendances, j'ai agrégé en 7 rubriques seulement les chiffres de consommation très détaillés fournis par l'INSEE.
À chaque trimestre sa crise. Dernier épisode en date, le bras de fer entre les producteurs de lait et la multinationale Lactalis dans le nord-ouest.
La fibre paysanne étant encore vivace, les petits fermiers bénéficient de la bienveillance des urbains qui, pourtant, s'ingénient à les couler.
Retour distancié et chiffré sur un thème passionnel.
Nous vivons toujours plus nombreux dans les champs
La population française a augmenté de deux tiers entre la fin de seconde guerre mondiale et aujourd’hui. Nous sommes 25 millions de plus qu’au moment du débarquement.Cette croissance, ainsi que la réduction de la taille des familles, a nécessité la construction de nombreux logements.
L’essentiel de cette urbanisation toujours vivace - maisons individuelles mais aussi immeubles - s’est faite en périphérie des villes et bourgades sur des terrains jusqu’alors cultivés.
L’auteur de ces lignes ne fait pas exception en la matière. J'habite un quartier de la banlieue de Grenoble qui était entièrement agricole 25 ans en arrière.
Lotissement récent à Meylan près de Grenoble. Sur la droite du cliché, les dernières cultures du quartier. |
Céder son outil de travail plus rentable que de trimer
Même avec la forte pression urbaine, les agriculteurs vendent leurs champs plus par intérêt économique que pour faire plaisir à leurs concitoyens en mal de logement.Les terres cultivables s'échangent actuellement en Isère autour de 0.7 €/m2, avec des minimas pouvant descendre à 0.1 €/m2 et des maximas vers 1.5 €/m2.
Un mètre carré planté en blé fournit, bon an mal an, 750 grammes de céréales, soit, au cours moyen, de l'ordre de 15 centimes d'euros.
Grosso modo, les champs valent quelques années de moisson.
En dehors de la viticulture, de l'horticulture et de la floriculture, toutes les productions agricoles ont des rendements économiques similaires.
À l'autre bout de l'échelle, dans la même région, les terrains constructibles pour des habitations se négocient en moyenne à 120 €/m2, avec des pointes à 200 €/m2, voire même 700 €/m2, dans les zones recherchées des vallées proches de Grenoble.
Le paysan qui vend un terrain pour le transformer en lotissement réalise donc une plus value entre 15 000% et 100 000%.
Lors de la signature chez le notaire, il engrange d'un coup entre 8 et 30 siècles de récoltes.
Ancienne ferme à Meylan. À droite de l'image, à l'arrière plan, des immeubles de moins de 10 ans. |
Notre logement avant notre assiette
Choix personnels, contraintes professionnelles, pesanteurs sociales et imperfections récurrentes du marché immobilier se conjuguent pour nous faire dépenser beaucoup pour notre habitation, son équipement et son entretien.Un quart de nos sous va à notre sweet home.
De même, éducation, médias et télécommunications ainsi que loisirs en tous genres s'accaparent un cinquième de notre budget.
Même si la bonne chère tient une place de choix dans nos conversations, en pratique notre nourriture est devenue une portion congrue de notre portefeuille, un gros huitième de ce qu'il en sort chaque mois.
Ces montants réduits sont utilisés surtout pour acheter des aliments transformés et assez peu de productions agricoles de base.
Je vous laisse imaginer ce qu'il peut en être dans les pays ne nourissant pas la passion française pour la bouffe et la boisson.
Répartition de la consommation des ménages français en 2015 |
Le sort des paysans est dans des mains tenant des smartphones et des clefs de maison
Les conséquences pour l'agriculture de ces myriades d'arbitrages individuels sont dramatiques : pression à la baisse sur les prix des denrées et envolée du cours des terrains s'ils cessent d'être cultivés.Seul un changement significatif et durable de nos habitudes personnelles de consommation permettrait de donner structurellement de l'oxygène au monde paysan.
Au delà de notre sympathie campagnarde de façade, sommes-nous prêts à dépenser moins pour notre gîte et plus pour notre couvert ?
À diminuer nos usages d'écrans ?
À lever le pied sur nos loisirs ?
Si - comme je le pratique - notre réponse collective est majoritairement non, alors nous devons cesser de nous lamenter sur les crises agricoles à répétition dont nous sommes les principaux responsables.
Arbi-tragiquement votre
Références et compléments
Voir aussi les chroniques :
- Cochonou vs éleveurs : dans le cochon tout est bon mais tout n’a pas la même valeur
- J'ai tué la librairie Arthaud de Grenoble
Je remercie les participants, qui se reconnaitront, à une récente discussion enflammée sur l'actuelle crise du lait entre paysans et Lactalis. Ce billet est directement issu de cet échange agité.
Outre les toujours très achalandés Wikipedia et INSEE, les chiffres annoncées dans cette chronique proviennent aussi des sites terrain-construction.com, leparticulier.fr et finances.net.
Pour mieux dégager les tendances, j'ai agrégé en 7 rubriques seulement les chiffres de consommation très détaillés fournis par l'INSEE.