Un dessin circulant sur le web a retenu mon attention.
Un balai et un livre légèrement éméchés sont accoudés à un bar devant des bières.
À l’arrière plan, des passants dans la rue ont le regard vissé sur leur smartphone.
Le balai dit à son camarade manifestement dubitatif « relax mon ami, ils ont inventé l’aspirateur et pourtant je suis encore là … ».
Ce croquis illustre la difficulté de transformer une nouvelle technologie en succès commercial.
L’aspirateur électrique, invention des ingénieurs britanniques Booth et Griffiths, a changé la donne. Plumeaux et autres brosses ont du céder du terrain.
Toutefois, un bon siècle plus tard, force est de constater qu’il n’y a toujours pas un aspirateur par logement, à l’inverse des balais.
La résistance des écouvillons s’explique aisément.
Pour être acheté, un produit doit persuader ses futurs clients que les avantages d’usage, d’image ou d’estime qu’il va leur procurer dépasseront les inévitables inconvénients, au premier rang d’entre eux le prix.
À cette aune, le balai excelle.
Il rend un service basique avec une mise en route instantanée et un espace de stockage réduit pour un coût modique.
En quelque sorte, du nettoyage low cost, l’EasyJet de la chasse aux moutons !
Son concurrent électrique est plus extrémiste.
Bien qu’étant un véritable aimant à poussière, il vaut toutefois 10 à 100 fois plus cher que son compétiteur ancestral.
Plus lourd à manier, il doit être branché ou rechargé mais aussi vidé régulièrement. De surcroît, il requiert un rangement.
Le bilan avantages - inconvénients n’est pas aisé à établir. L’efficacité de nettoyage est contrebalancée par un usage moins aisé et un prix plus élevé.
Tous comptes faits, Dyson ressemble plus à Audi qu’à Google.
Lorsque l’automobile sort des limbes à la fin du XIXème siècle, les véhicules hippomobiles ont à leur actif sensiblement 3 000 ans de bons et loyaux services dans le transport.
Dans les grandes villes, les fiacres, particulièrement bien adaptés aux boulevards nouvellement tracés connaissent le succès d’Uber aujourd’hui.
Et pourtant, en peu de temps, les taxis les balaient. En 1914, ils jouent même un rôle décisif à la bataille de la Marne, acheminant en un temps record des troupes au plus près de la ligne de feu.
La raison de cette victoire par KO est là encore à rechercher dans le bilan avantages - inconvénients.
La voiture a provoqué une rupture en termes de vitesse et de rayon d’action.
Si la bagnole est plus chère à l’achat qu’un bourrin et une carriole, son entretien est beaucoup plus frugal que celui d’un canasson. Pour le dire avec les anglicismes actuels, le total cost of ownership a été très rapidement en faveur de l’automobile.
De plus, l’auto a contribué à rehausser le statut de son conducteur.
Ajoutons aussi au rayon des avantages le ramassage du crottin dans les rue devenu inutile.
Excepté les émissions de CO2 qui ne nous intéressent que depuis peu, le cheval n’a rien eu à opposer à la voiture, d’où sa relégation.
Quel sera le sort du livre face aux alternatives digitales ?
Difficile à dire mais il est probable que si les prix des e-books ne baisse pas plus et que les verrous numériques qui plombent la facilité d’usage subsistent, la bibliothèque rejoindra le placard à balai.
Balayagiquement votre
Références et compléments
- Voir aussi la chronique « l'irrésistible attrait du livre électronique » qui propose un éclairage très différent voire contradictoire.
- Je n’ai pas réussi à déterminer avec certitude l’origine du dessin. Il semblerait qu’il s’agisse du site espagnol chistes21.com.
- Article Wikipedia en anglais sur l’histoire de l’aspirateur.
- Les premières traces archéologiques de voitures à cheval sont celtiques. Elles datent du premier âge du fer, un sympathique millier d'années avant notre ère.
Un balai et un livre légèrement éméchés sont accoudés à un bar devant des bières.
À l’arrière plan, des passants dans la rue ont le regard vissé sur leur smartphone.
Le balai dit à son camarade manifestement dubitatif « relax mon ami, ils ont inventé l’aspirateur et pourtant je suis encore là … ».
Ce croquis illustre la difficulté de transformer une nouvelle technologie en succès commercial.
L’aspirateur n’a pas su balayer le balai
Jusqu’au début du XXème siècle, le balai jouissait depuis des lustres immémoriaux d’une exclusivité sur le marché de la lutte contre la poussière.L’aspirateur électrique, invention des ingénieurs britanniques Booth et Griffiths, a changé la donne. Plumeaux et autres brosses ont du céder du terrain.
Toutefois, un bon siècle plus tard, force est de constater qu’il n’y a toujours pas un aspirateur par logement, à l’inverse des balais.
La résistance des écouvillons s’explique aisément.
Pour être acheté, un produit doit persuader ses futurs clients que les avantages d’usage, d’image ou d’estime qu’il va leur procurer dépasseront les inévitables inconvénients, au premier rang d’entre eux le prix.
À cette aune, le balai excelle.
Il rend un service basique avec une mise en route instantanée et un espace de stockage réduit pour un coût modique.
En quelque sorte, du nettoyage low cost, l’EasyJet de la chasse aux moutons !
Son concurrent électrique est plus extrémiste.
Bien qu’étant un véritable aimant à poussière, il vaut toutefois 10 à 100 fois plus cher que son compétiteur ancestral.
Plus lourd à manier, il doit être branché ou rechargé mais aussi vidé régulièrement. De surcroît, il requiert un rangement.
Le bilan avantages - inconvénients n’est pas aisé à établir. L’efficacité de nettoyage est contrebalancée par un usage moins aisé et un prix plus élevé.
Tous comptes faits, Dyson ressemble plus à Audi qu’à Google.
L’automobile a aspiré les fiacres
Nombreux sont les produits ou services ancestraux que les révolutions industrielles successives ont expédié aux oubliettes.Lorsque l’automobile sort des limbes à la fin du XIXème siècle, les véhicules hippomobiles ont à leur actif sensiblement 3 000 ans de bons et loyaux services dans le transport.
Dans les grandes villes, les fiacres, particulièrement bien adaptés aux boulevards nouvellement tracés connaissent le succès d’Uber aujourd’hui.
Et pourtant, en peu de temps, les taxis les balaient. En 1914, ils jouent même un rôle décisif à la bataille de la Marne, acheminant en un temps record des troupes au plus près de la ligne de feu.
La raison de cette victoire par KO est là encore à rechercher dans le bilan avantages - inconvénients.
La voiture a provoqué une rupture en termes de vitesse et de rayon d’action.
Si la bagnole est plus chère à l’achat qu’un bourrin et une carriole, son entretien est beaucoup plus frugal que celui d’un canasson. Pour le dire avec les anglicismes actuels, le total cost of ownership a été très rapidement en faveur de l’automobile.
De plus, l’auto a contribué à rehausser le statut de son conducteur.
Ajoutons aussi au rayon des avantages le ramassage du crottin dans les rue devenu inutile.
Excepté les émissions de CO2 qui ne nous intéressent que depuis peu, le cheval n’a rien eu à opposer à la voiture, d’où sa relégation.
Le livre papier, future lampe à pétrole ou futur balai ?
Les becs de gaz, le papier carbone, les porteurs d’eau ainsi que bien d’autres produits et professions ont connu des coups de balai tragiquement analogues.Quel sera le sort du livre face aux alternatives digitales ?
Difficile à dire mais il est probable que si les prix des e-books ne baisse pas plus et que les verrous numériques qui plombent la facilité d’usage subsistent, la bibliothèque rejoindra le placard à balai.
Balayagiquement votre
Références et compléments
- Voir aussi la chronique « l'irrésistible attrait du livre électronique » qui propose un éclairage très différent voire contradictoire.
- Je n’ai pas réussi à déterminer avec certitude l’origine du dessin. Il semblerait qu’il s’agisse du site espagnol chistes21.com.
- Article Wikipedia en anglais sur l’histoire de l’aspirateur.
- Les premières traces archéologiques de voitures à cheval sont celtiques. Elles datent du premier âge du fer, un sympathique millier d'années avant notre ère.