Je me rends en Tunisie depuis plus de 30 ans et - les colonnes de ce blog s'en font régulièrement l'écho - je nourris une vraie passion vis à vis de ce territoire et de ses habitants.
Toutefois, comme n'importe où ailleurs, les nombreux bons côtés avoisinent des aspects moins sympathiques.
Aussi, une fois n'est pas coutume, je voudrais piquer un coup de gueule à l'encontre de mon pays de coeur.
Le 12 août 2015, plusieurs petits orages se sont abattus sur Kelibia, dans le Cap Bon.
Bien que ce soit un peu tôt dans la saison, ces pluies drues et brèves n'ont rien d'exceptionnel. Elles sont même caractéristiques du bassin méditerranéen, le crachin tant breton que britannique n'ayant guère droit de cité dans l'antique Carthage.
Le résultat de ces courtes averses ne s'est pas fait attendre.
À chaque pluie, plusieurs centimètres d'eau envahissent les rues transformées en ruisseaux.
Le retour du soleil illumine ensuite flaques et plaques de boue. Les voies non asphaltées ressemblent alors à des fondrières.
Je dois constater, amèrement, que l'écoulement des eaux pluviales et, plus généralement, la voirie restent un des talons d'Achille de la Tunisie.
La situation s'est même aggravée car l'urbanisation grandissante et le goudronnage des rues réalisé sans aucune évacuation accroissent singulièrement le ruissellement.
Malgré les successions politiques - Bourguiba, Ben Ali, un gouvernement révolutionnaire puis deux démocratiques - et la croissance économique soutenue, délivrer des services publics basiques de qualité acceptable semble être le cadet des soucis des administrations tunisiennes et de leurs dirigeants.
Pourtant les routes sont - au moins en ce qui concerne la maîtrise d'ouvrage - franchement du ressort de la sphère publique.
Comment une somme d'intérêts individuels pourrait s'accorder pour les tracer et les entretenir ?
Une des causes des inondations récurrentes est la construction anarchique qui laisse tout un chacun bâtir ou agrandir sa maison sans véritable contrainte, en se souciant peu des autres et en dirigeant allègrement les eaux pluviales vers les caniveaux, voire directement sur les trottoirs.
Au même titre qu'une surveillance résolue et punitive de la très meurtrière circulation routière, une amélioration durable des voiries et des écoulements ainsi qu'une police des constructions sont indispensables.
Les gouvernements en place et à venir gagneraient à se préoccuper efficacement de l'intendance. Un état se rend respectable en s'intéressant au quotidien de ses citoyens.
Mais, d'abord et avant tout, dans la vie courante, chaque tunisien pourrait et devrait faire montre d'un chouïa plus de - osons ce gros mot plus viking que gaulois - civisme.
La sécurité et le bien-être collectifs proviennent plus des efforts de tous que des décisions "d'en haut".
Comme le chantait le regretté Serge Reggiani, "il suffirait de presque rien" ...
Humidement votre
Références et compléments
- Voir aussi mes autres chroniques sur la Tunisie, notamment le billet sur la violence routière.
Toutefois, comme n'importe où ailleurs, les nombreux bons côtés avoisinent des aspects moins sympathiques.
Aussi, une fois n'est pas coutume, je voudrais piquer un coup de gueule à l'encontre de mon pays de coeur.
Le 12 août 2015, plusieurs petits orages se sont abattus sur Kelibia, dans le Cap Bon.
Bien que ce soit un peu tôt dans la saison, ces pluies drues et brèves n'ont rien d'exceptionnel. Elles sont même caractéristiques du bassin méditerranéen, le crachin tant breton que britannique n'ayant guère droit de cité dans l'antique Carthage.
Le résultat de ces courtes averses ne s'est pas fait attendre.
À chaque pluie, plusieurs centimètres d'eau envahissent les rues transformées en ruisseaux.
Le retour du soleil illumine ensuite flaques et plaques de boue. Les voies non asphaltées ressemblent alors à des fondrières.
Pluie le 12 août 2015 à Kelibia |
La situation s'est même aggravée car l'urbanisation grandissante et le goudronnage des rues réalisé sans aucune évacuation accroissent singulièrement le ruissellement.
Malgré les successions politiques - Bourguiba, Ben Ali, un gouvernement révolutionnaire puis deux démocratiques - et la croissance économique soutenue, délivrer des services publics basiques de qualité acceptable semble être le cadet des soucis des administrations tunisiennes et de leurs dirigeants.
Pourtant les routes sont - au moins en ce qui concerne la maîtrise d'ouvrage - franchement du ressort de la sphère publique.
Comment une somme d'intérêts individuels pourrait s'accorder pour les tracer et les entretenir ?
Une des causes des inondations récurrentes est la construction anarchique qui laisse tout un chacun bâtir ou agrandir sa maison sans véritable contrainte, en se souciant peu des autres et en dirigeant allègrement les eaux pluviales vers les caniveaux, voire directement sur les trottoirs.
Au même titre qu'une surveillance résolue et punitive de la très meurtrière circulation routière, une amélioration durable des voiries et des écoulements ainsi qu'une police des constructions sont indispensables.
Les gouvernements en place et à venir gagneraient à se préoccuper efficacement de l'intendance. Un état se rend respectable en s'intéressant au quotidien de ses citoyens.
Mais, d'abord et avant tout, dans la vie courante, chaque tunisien pourrait et devrait faire montre d'un chouïa plus de - osons ce gros mot plus viking que gaulois - civisme.
La sécurité et le bien-être collectifs proviennent plus des efforts de tous que des décisions "d'en haut".
Comme le chantait le regretté Serge Reggiani, "il suffirait de presque rien" ...
Humidement votre
Références et compléments
- Voir aussi mes autres chroniques sur la Tunisie, notamment le billet sur la violence routière.