Récemment, lors d'un dîner entre amis, j'ai participé à une discussion passionnée entre des partisans de l'enseignement d'un socle de savoirs traditionnels et des tenants d'un abandon de disciplines rendues obsolètes par les progrès de l'informatique et des réseaux : calcul mental, orthographe et certains apprentissages par coeur comme les cartes muettes de géographie ...
Cette controverse me parait ancestrale. Quelques exemples :
- A Sumer, trois mille ans avant notre ère, les adeptes de la tradition orale ont du s'opposer aux promoteurs de l'écriture récemment inventée, au prétexte que cette nouvelle technologie d'information et de communication allait mettre à mal la développement de la mémoire.
- Plus tard, à chaque évolution technique - papyrus, parchemin, papier puis imprimerie - les supporters de la qualité traditionnelle de l'information ont essayé de résister aux promoteurs de la quantité.
- Plus récemment, au milieu des années 1970, la règle à calcul, qui ne datait pourtant que de 1654, mena, dans les lycées, une résistance aussi acharnée que désespérée aux calculatrices.
- De même, au début de ma vie professionnelle, vers 1985, dans les bureaux d'études, la Conception Assistée par Ordinateur (CAO) alors balbutiante s'est pris de plein fouet l'inertie, un temps triomphante, des planches à dessin et des "dessinateurs industriels".
Chaque évolution améliorant la communication ou facilitant la mémorisation en dehors du cerveau humain semble s'être heurtée aux défenseurs de l'ordre ancien.
Alors que l'éducation consiste à inculquer aux enfants des connaissances et des savoir-faire utiles leur vie entière, un consensus conservateur se maintient au fil des ans pour continuer des enseignements rendus obsolètes par les progrès techniques.
Que nos rejetons puissent maîtriser des compétences qui nous échappent est une perspective effrayante contre laquelle nous tentons vainement de lutter en nous raccrochant à ce que nous connaissons. Même nos cours d'histoire, pourtant archétype des "humanités", ne sont apparemment d'aucun recours pour éviter ce réflexe très ancré.
En guise de conclusion, une petite interrogation rétrospective pour déculpabiliser les conservateurs pédagogiques que nous sommes tous peu ou prou : qui aurait réussi à expliquer au plutôt francophone Guillaume le Conquérant en septembre 1066, alors qu'il s'apprêtait à envahir les Iles Britanniques, que la langue anglaise allait quelques siècles plus tard dominer le monde ?
Traditionnellement votre
Références et compléments
- Ces chroniques doivent beaucoup aux "technologies récentes" que sont Wikipedia et le dictionnaire des synonymes du CRISCO de l'Université de Caen
- Article Wikipedia sur l'écriture
- Article Wikipedia sur Guillaume II de Normandie dit le Conquérant
- Article sur le "middle english" du site de Jacques Leclerc sur l'aménagement linguistique dans le monde
Cette controverse me parait ancestrale. Quelques exemples :
- A Sumer, trois mille ans avant notre ère, les adeptes de la tradition orale ont du s'opposer aux promoteurs de l'écriture récemment inventée, au prétexte que cette nouvelle technologie d'information et de communication allait mettre à mal la développement de la mémoire.
- Plus tard, à chaque évolution technique - papyrus, parchemin, papier puis imprimerie - les supporters de la qualité traditionnelle de l'information ont essayé de résister aux promoteurs de la quantité.
- Plus récemment, au milieu des années 1970, la règle à calcul, qui ne datait pourtant que de 1654, mena, dans les lycées, une résistance aussi acharnée que désespérée aux calculatrices.
- De même, au début de ma vie professionnelle, vers 1985, dans les bureaux d'études, la Conception Assistée par Ordinateur (CAO) alors balbutiante s'est pris de plein fouet l'inertie, un temps triomphante, des planches à dessin et des "dessinateurs industriels".
Chaque évolution améliorant la communication ou facilitant la mémorisation en dehors du cerveau humain semble s'être heurtée aux défenseurs de l'ordre ancien.
Alors que l'éducation consiste à inculquer aux enfants des connaissances et des savoir-faire utiles leur vie entière, un consensus conservateur se maintient au fil des ans pour continuer des enseignements rendus obsolètes par les progrès techniques.
Que nos rejetons puissent maîtriser des compétences qui nous échappent est une perspective effrayante contre laquelle nous tentons vainement de lutter en nous raccrochant à ce que nous connaissons. Même nos cours d'histoire, pourtant archétype des "humanités", ne sont apparemment d'aucun recours pour éviter ce réflexe très ancré.
En guise de conclusion, une petite interrogation rétrospective pour déculpabiliser les conservateurs pédagogiques que nous sommes tous peu ou prou : qui aurait réussi à expliquer au plutôt francophone Guillaume le Conquérant en septembre 1066, alors qu'il s'apprêtait à envahir les Iles Britanniques, que la langue anglaise allait quelques siècles plus tard dominer le monde ?
Traditionnellement votre
Références et compléments
- Ces chroniques doivent beaucoup aux "technologies récentes" que sont Wikipedia et le dictionnaire des synonymes du CRISCO de l'Université de Caen
- Article Wikipedia sur l'écriture
- Article Wikipedia sur Guillaume II de Normandie dit le Conquérant
- Article sur le "middle english" du site de Jacques Leclerc sur l'aménagement linguistique dans le monde