Il m'aura fallu venir au sud du Japon à presque 10 000 km de la Mère Patrie pour enfin assouvir un de mes rêves les plus anciens : déguster un vin sentant le raisin !
D'habitude, ce produit de la vigne et de la culture méditerranéenne exhale toutes sortes d'arômes sans aucun rapport avec ses origines : banane, fruits rouges, caramel, vanille, touches boisées, balsamiques ou florales, sans oublier parfois le bouchon.
Eh bien, le "Ste Neige Excellente - Pinot et Cabernet", production viticole de la préfecture d'Oita sur l'île de Kyushu, va directement à l'essentiel : son goût est franchement celui du raisin et il s'annonce fièrement "sulfite free" !
Le picrate ayant les mêmes vertus sociales au Japon que partout ailleurs, le "Ste Neige sulfite free" m'a permis de prendre langue avec un vénérable universitaire nippon.
Au quatrième godet, ce dernier a abandonné les mondanités d'usage ("France is beautiful … Japan is very safe … Shinto is very different from Christianism …") pour se mettre à déclamer de tête et dans la langue de Paul Verlaine :
"Les sanglots longs
Des violons
De l’automne
Blessent mon cœur
D’une langueur
Monotone.
Tout suffocant
Et blême, quand
Sonne l'heure,
Je me souviens
Des jours anciens.
Et je pleure.
Et je m'en vais
Au vent mauvais
Qui m'emporte
Deçà, delà,
Pareil à la
Feuille morte."
Il m'a ensuite demandé se je pouvais lui réciter d'autres poèmes français car il avait, 50 ans en arrière, étudié de nombreuses traductions japonaises qui lui avaient donné l'envie d'apprendre par cœur l'original.
Quelques souvenirs scolaires issus de l'Albatros et du Bateau Ivre (encore un coup du "Ste Neige") m'ont évité le ridicule et ont permis à la conversation de bifurquer sur la poésie japonaise et ses trois formes principales.
Je me cantonnerais à la plus courte : le Haïku composé de seulement 17 syllabes (5 + 7 + 5). Voici le plus célèbre écrit par Basho au XVIIème siècle :
"Furu ike ya
Kawazu tobi komu
Mizu no oto"
Ce qui donne à peu près en français :
"Vieil étang,
Au plongeon de la grenouille,
L'eau bruisse"
Aussi, pour rendre impérissable cette belle soirée, je finirais par une sorte de Haïku français du genre Senryu, c'est-à-dire parodique, en m'inspirant de Guillaume Apollinaire, l'auteur d'Alcools :
"Ah ! Ste neige !
Sans sulfite et que n'ai-je ton goût
de raisin entre mes lèvres !"
Hips ! Nipponiquement votre …
Complément bibliographique
- Le poème original de Guillaume Apollinaire est intitulé Blanche Neige.
D'habitude, ce produit de la vigne et de la culture méditerranéenne exhale toutes sortes d'arômes sans aucun rapport avec ses origines : banane, fruits rouges, caramel, vanille, touches boisées, balsamiques ou florales, sans oublier parfois le bouchon.
Eh bien, le "Ste Neige Excellente - Pinot et Cabernet", production viticole de la préfecture d'Oita sur l'île de Kyushu, va directement à l'essentiel : son goût est franchement celui du raisin et il s'annonce fièrement "sulfite free" !
Le picrate ayant les mêmes vertus sociales au Japon que partout ailleurs, le "Ste Neige sulfite free" m'a permis de prendre langue avec un vénérable universitaire nippon.
Au quatrième godet, ce dernier a abandonné les mondanités d'usage ("France is beautiful … Japan is very safe … Shinto is very different from Christianism …") pour se mettre à déclamer de tête et dans la langue de Paul Verlaine :
"Les sanglots longs
Des violons
De l’automne
Blessent mon cœur
D’une langueur
Monotone.
Tout suffocant
Et blême, quand
Sonne l'heure,
Je me souviens
Des jours anciens.
Et je pleure.
Et je m'en vais
Au vent mauvais
Qui m'emporte
Deçà, delà,
Pareil à la
Feuille morte."
Il m'a ensuite demandé se je pouvais lui réciter d'autres poèmes français car il avait, 50 ans en arrière, étudié de nombreuses traductions japonaises qui lui avaient donné l'envie d'apprendre par cœur l'original.
Quelques souvenirs scolaires issus de l'Albatros et du Bateau Ivre (encore un coup du "Ste Neige") m'ont évité le ridicule et ont permis à la conversation de bifurquer sur la poésie japonaise et ses trois formes principales.
Je me cantonnerais à la plus courte : le Haïku composé de seulement 17 syllabes (5 + 7 + 5). Voici le plus célèbre écrit par Basho au XVIIème siècle :
"Furu ike ya
Kawazu tobi komu
Mizu no oto"
Ce qui donne à peu près en français :
"Vieil étang,
Au plongeon de la grenouille,
L'eau bruisse"
Aussi, pour rendre impérissable cette belle soirée, je finirais par une sorte de Haïku français du genre Senryu, c'est-à-dire parodique, en m'inspirant de Guillaume Apollinaire, l'auteur d'Alcools :
"Ah ! Ste neige !
Sans sulfite et que n'ai-je ton goût
de raisin entre mes lèvres !"
Hips ! Nipponiquement votre …
Complément bibliographique
- Le poème original de Guillaume Apollinaire est intitulé Blanche Neige.