samedi 9 juin 2012

e-Panthéon 2.0

Pauvres rois pharaons, pauvre Napoléon,
Pauvres grands disparus gisant au Panthéon,
Pauvres cendres de conséquence,
Vous envierez un peu l'éternel estivant,
Qui fait du pédalo sur la vague en rêvant,
Qui passe sa mort en vacances.
Georges Brassens - Supplique pour être enterré sur la plage de Sète

La "crise d'une ampleur inégalée" dans laquelle nous nous débattons depuis quatre ans, au delà des turbulences économiques qui nous frappent de plein fouet, est révélatrice de profonds bouleversements techniques et sociétaux.
L'univers issu des révolutions industrielles "hard" du charbon, de la vapeur, de l'acier, du moteur à explosion et de l'électricité reflue sous nos yeux tandis qu'un nouveau monde "soft" émerge autour des technologies de l'information et des télécommunications.

La plupart des célébrités du passé ne survivront pas à ce changement radical. Je propose donc de vider illico presto le Panthéon physique du Quartier Latin de Paris de ses franchouillardes "cendres de conséquence" et de le convertir en cyber-café.
Dans le même temps, un e-Panthéon 2.0 virtuel serait mis en ligne dans lequel figureraient les personnalités internationales, vivantes ou décédées, ayant contribué de façon décisive aux évolutions en cours.

Voici une première livraison de dix heureux élus à l'e-Panthéon 2.0 :

- Sadi Carnot (Nicolas Léonard Sadi Carnot)
Ce physicien français formula dans les années 1820 les principales lois de la thermodynamique.
Ses travaux montraient l'impossibilité de créer ex nihilo de l'énergie ainsi que la limitation des rendements. Ils laissaient aussi entrevoir l'augmentation irrépressible de l'entropie, c'est à dire du bordel ambiant. Alors que la Révolution Industrielle battait son plein, Sadi Carnot annonçait déjà sa fin.

- Joseph Schumpeter
Economiste austro-apatride, Schumpeter, durant la crise des années 1920 et 1930, battit en brèche les théories économiques libérales, marxistes et keynésiennes.
Pour lui, le coeur de l'activité économique est l'innovation qu'il qualifie de destruction créatrice. Il a aussi mis en avant que le profit n'était pas le seul mobile de l'entrepreneur-innovateur mais aussi la volonté de puissance, le goût sportif de la victoire ou l'envie de créer.

- Alan Turing
Ce mathématicien britannique est le père conceptuel de l'ordinateur. Ses recherches fondamentales et ses travaux sur le décryptage des codes durant la seconde guerre mondiale ont jeté les bases de l'informatique.
Persécuté pour son homosexualité, Alan Turing s'est suicidé en 1954 à 42 ans alors que sa production scientifique était à son zénith.

- Claude Shannon
Si Turing a formalisé la notion de calcul et d'algorithme, l'ingénieur américain Claude Shannon a élaboré la théorie de l'information. Nous lui devons le bit et l'octet et toutes leurs conséquences.
Comble de l'ironie grinçante, ce grand créatif, amateur de paradoxes, a été lourdement frappé à la fin de sa vie par la maladie d'Alzheimer.

- John von Neumann (János Neumann de Margitta)
Mathématicien et physicien, esprit éclectique, cet américano-hongrois - malgré ses nombreux défauts : coureur de jupons, anticommuniste viscéral, promoteur actif de l'arme atomique ... - a  été décisif dans la création de l'architecture des ordinateurs toujours employée aujourd'hui.

- Steve Jobs & Bill Gates
A l'instar du pneu, créé par Goodyear mais popularisé par Dunlop et les frères Michelin, l'informatique de Turing, Shannon et von Neumann est véritablement devenue universelle grâce aux deux binoclards d'Apple et de Microsoft.
Si le "gentil" Steve Jobs a rendu les ordinateurs utilisables par tout un chacun, son "vilain" compère Bill Gates en a fait un véritable produit de masse.

- Linus Torvalds
Ce finlandais suédophone - difficile de faire plus minoritaire à l'échelle planétaire - a rendu public et libre le logiciel Linux qu'il a créé. Cette action d'apparence anodine a révolutionné la propriété intellectuelle. Les licences libres et le "copyleft" concurrencent désormais les brevets et le copyright.

- Taiichi Ono & Shigeo Shingo
Ces deux ingénieurs japonais ont mis en place le Toyota Production System (TPS), plus connu dans nos contrées sous le vocable de lean manufacturing (littéralement production maigre). Cette organisation industrielle frugale, aux antipodes du taylorisme, s'efforce d'économiser toutes les ressources nécessaires à une fabrication et d'éliminer toutes les causes de gâchis (muda en japonais). Née dans les ateliers, cette école de pensée s'intéresse désormais aux bureaux et aux systèmes tertiaires.

Le principal avantage de ce virtuel e-Panthéon 2.0 est d'être totalement subjectif et versatile.
Une célébrité ne vous plait plus, désinstallez la ! Un vénérable ancêtre vous tape dans l'oeil, recopiez le !
Je vous invite, par l'entremise des commentaires ci-dessous, à faire preuve de destruction créatrice dans cette liste de talents 2.0.

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Références et compléments