Depuis quelques semaines, j'ai la chance, dans mon activité professionnelle, de côtoyer quotidiennement des spécialistes de l'informatique. Le choc des cultures et des sémantiques est particulièrement brutal.
Jugez sur quelques pièces.
Ordinateurs et logiciels ont une tendance prononcée, dès qu'on les regarde de près, à préférer la langue d'Alan Turing à celle de Blaise Pascal.
Toutefois, la plupart des informaticiens français optent résolument pour une prononciation plus gauloise que texane.
Ainsi le nuage de données qui plane au dessus de nos smartphones et de ce blog s'appelle le "clou deux", peut-être parce que les machines qui assurent son fonctionnement font partie du hardware, la quincaillerie en anglais.
Seule exception, pour désigner leur domaine - IT Information Technologies - ces professionnels tiennent absolument au phrasé new-yorkais "ail ti". En effet, clamer que l'on travaille "alité" risque de vous faire passer pour un indécrottable fainéant.
Les acronymes sont pléthore. Pour qu'un concept, aussi basique soit-il, ait une once de crédibilité, il doit impérativement être désigné par un sigle d'obédience anglo-saxonne. Une interprétation un peu trop phonétique peut conduire à de désagréables contresens.
Ainsi un "sas" n'est pas un espace de transition mais tout simplement la location d'un logiciel domicilié dans un cumulo-nimbus.
De même un "path", n'est pas comme son étymologie rosbif pourrait le laisser supposer, le chemin permettant d'accéder à un fichier ou à un document mais, une fois encore, la location d'un bazar peu déterminé réfugié dans un strato-cumulus.
Dans la même veine, l'inénarrable Bill Gates n'a rien trouvé de mieux que d'affubler ses nuages du qualificatif "azur". De deux choses l'une, soit le créateur de Microsoft est encore plus daltonien que votre serviteur et croit que les nébulosités sont bleues ; soit, à force d'être scotché à un écran de son ordinateur, Mister Windows a fini par oublier les plus élémentaires notions de météorologie.
Il y a une trentaine d'années, lorsque je commençais mon long parcours de salarié, l'endoctrinement alors en vogue inculquait que le client est le personnage le plus important de l'entreprise et que le choyer en permanence était indispensable à la survie du business.
L'informatique vient bousculer ce superbe catéchisme.
Ce que tout épicier ou boulanger nomme un client est dans le monde "ail ti" un usager.
Afin d'avancer masqué et ne pas trop désespérer les habitués des TER ou de la RATP, l'américain "iouzeur" est toutefois d'emploi systématique.
Le client - pour faire riche dîtes "claille hante" - est en fait le logiciel qu'utilise le client, pardon le "iouzeur".
Ce "claille hante" est désormais l'objet des soins assidus du personnel.
La preuve, un serveur est en permanence à son écoute, prêt à répondre à ses moindres requêtes grâce à un voire même plusieurs protocoles soigneusement établis.
La dernière mode venue de Californie est soucieuse de la sveltesse des "clailles hante". Les clients trop lourds n'ont plus la cote. Pour continuer à être servi, il est impératif de faire maigrir l'élément le plus important de l'informatique.
Quant à la satisfaction de l'usager, un logiciel - pardon, un client très léger - tachera de s'en enquérir dès que les règles business appropriées auront été définies ...
Informatiquement votre
Eléments de décodage, pardon, de reverse engineering
Pour les très rares lecteurs qui ne se sont pas encore "alités" :
. Cloud, nuage en français, se dit des installations informatiques réparties à travers la planète et accessibles par internet.
À titre d'exemple, les Humeurs Mondialisées sont domiciliées quelque part dans le "clou deux".
. Le "sas" est en fait le SaaS, Software as a Service, logiciel en tant que service c'est à dire un programme fonctionnant dans le "clou deux" et dont vous louez l'usage.
. Le "path" s'ecrit PaaS, Platform as a Service, plateforme en tant que service. Il s'agit de la location simultanée de machines et de logiciels dans le "clou deux".
. Windows Azure (avec un E terminal) est la marque déposée du "clou deux" de Microsoft.
. Un client est un logiciel fonctionnant sur la machine du client, pardon du "iouzeur".
Un client est dit léger, par opposition au client lourd, quand l'essentiel des traitements est effectué dans le "clou deux" par un autre programme baptisé serveur.
Le monde virtuel des clients légers est aussi inégalitaire que notre monde bien réel. Certains clients, non contents d'afficher un tour de taille particulièrement réduit, sont nettement mieux dotés que leurs confrères et sont alors qualifiés de clients riches.
Que le lecteur de gauche se rassure, bien que ni Arnaud Montebourg, ni Jean-Luc Mélenchon ne soient intervenus dans ce domaine, le client riche est en très nette perte de vitesse.
. Les business rules, qui se traduisent dans la langue de Louis Renault par règles métier, ont rarement un rapport direct avec le coté sonnant et trébuchant des entreprises. Ce sont, tout simplement, des savoir-faire incorporés dans un logiciel.
Par exemple, savoir que pour serrer des boulons il faut tourner dans le sens des aiguilles d'une montre est une règle business.
Références et compléments
- Tous mes remerciements et mêmes mes excuses à mes nouveaux compagnons de labeur. Qui aime bien, ironise bien ...
- J'ignore si Bill Gates est daltonien.
Par contre, Marc Zuckerberg, le fondateur de Facebook ne fait pas mystère de sa vision altérée des couleurs. Il s'agit même de la raison pour laquelle il a choisi le bleu comme emblème de sa marque car il s'agit d'une teinte qu'il sait détecter sans problème.
Jugez sur quelques pièces.
Ordinateurs et logiciels ont une tendance prononcée, dès qu'on les regarde de près, à préférer la langue d'Alan Turing à celle de Blaise Pascal.
Toutefois, la plupart des informaticiens français optent résolument pour une prononciation plus gauloise que texane.
Ainsi le nuage de données qui plane au dessus de nos smartphones et de ce blog s'appelle le "clou deux", peut-être parce que les machines qui assurent son fonctionnement font partie du hardware, la quincaillerie en anglais.
Seule exception, pour désigner leur domaine - IT Information Technologies - ces professionnels tiennent absolument au phrasé new-yorkais "ail ti". En effet, clamer que l'on travaille "alité" risque de vous faire passer pour un indécrottable fainéant.
Les acronymes sont pléthore. Pour qu'un concept, aussi basique soit-il, ait une once de crédibilité, il doit impérativement être désigné par un sigle d'obédience anglo-saxonne. Une interprétation un peu trop phonétique peut conduire à de désagréables contresens.
Ainsi un "sas" n'est pas un espace de transition mais tout simplement la location d'un logiciel domicilié dans un cumulo-nimbus.
De même un "path", n'est pas comme son étymologie rosbif pourrait le laisser supposer, le chemin permettant d'accéder à un fichier ou à un document mais, une fois encore, la location d'un bazar peu déterminé réfugié dans un strato-cumulus.
Dans la même veine, l'inénarrable Bill Gates n'a rien trouvé de mieux que d'affubler ses nuages du qualificatif "azur". De deux choses l'une, soit le créateur de Microsoft est encore plus daltonien que votre serviteur et croit que les nébulosités sont bleues ; soit, à force d'être scotché à un écran de son ordinateur, Mister Windows a fini par oublier les plus élémentaires notions de météorologie.
Il y a une trentaine d'années, lorsque je commençais mon long parcours de salarié, l'endoctrinement alors en vogue inculquait que le client est le personnage le plus important de l'entreprise et que le choyer en permanence était indispensable à la survie du business.
L'informatique vient bousculer ce superbe catéchisme.
Ce que tout épicier ou boulanger nomme un client est dans le monde "ail ti" un usager.
Afin d'avancer masqué et ne pas trop désespérer les habitués des TER ou de la RATP, l'américain "iouzeur" est toutefois d'emploi systématique.
Le client - pour faire riche dîtes "claille hante" - est en fait le logiciel qu'utilise le client, pardon le "iouzeur".
Ce "claille hante" est désormais l'objet des soins assidus du personnel.
La preuve, un serveur est en permanence à son écoute, prêt à répondre à ses moindres requêtes grâce à un voire même plusieurs protocoles soigneusement établis.
La dernière mode venue de Californie est soucieuse de la sveltesse des "clailles hante". Les clients trop lourds n'ont plus la cote. Pour continuer à être servi, il est impératif de faire maigrir l'élément le plus important de l'informatique.
Quant à la satisfaction de l'usager, un logiciel - pardon, un client très léger - tachera de s'en enquérir dès que les règles business appropriées auront été définies ...
Informatiquement votre
Eléments de décodage, pardon, de reverse engineering
Pour les très rares lecteurs qui ne se sont pas encore "alités" :
. Cloud, nuage en français, se dit des installations informatiques réparties à travers la planète et accessibles par internet.
À titre d'exemple, les Humeurs Mondialisées sont domiciliées quelque part dans le "clou deux".
. Le "sas" est en fait le SaaS, Software as a Service, logiciel en tant que service c'est à dire un programme fonctionnant dans le "clou deux" et dont vous louez l'usage.
. Le "path" s'ecrit PaaS, Platform as a Service, plateforme en tant que service. Il s'agit de la location simultanée de machines et de logiciels dans le "clou deux".
. Windows Azure (avec un E terminal) est la marque déposée du "clou deux" de Microsoft.
. Un client est un logiciel fonctionnant sur la machine du client, pardon du "iouzeur".
Un client est dit léger, par opposition au client lourd, quand l'essentiel des traitements est effectué dans le "clou deux" par un autre programme baptisé serveur.
Le monde virtuel des clients légers est aussi inégalitaire que notre monde bien réel. Certains clients, non contents d'afficher un tour de taille particulièrement réduit, sont nettement mieux dotés que leurs confrères et sont alors qualifiés de clients riches.
Que le lecteur de gauche se rassure, bien que ni Arnaud Montebourg, ni Jean-Luc Mélenchon ne soient intervenus dans ce domaine, le client riche est en très nette perte de vitesse.
. Les business rules, qui se traduisent dans la langue de Louis Renault par règles métier, ont rarement un rapport direct avec le coté sonnant et trébuchant des entreprises. Ce sont, tout simplement, des savoir-faire incorporés dans un logiciel.
Par exemple, savoir que pour serrer des boulons il faut tourner dans le sens des aiguilles d'une montre est une règle business.
Références et compléments
- Tous mes remerciements et mêmes mes excuses à mes nouveaux compagnons de labeur. Qui aime bien, ironise bien ...
- J'ignore si Bill Gates est daltonien.
Par contre, Marc Zuckerberg, le fondateur de Facebook ne fait pas mystère de sa vision altérée des couleurs. Il s'agit même de la raison pour laquelle il a choisi le bleu comme emblème de sa marque car il s'agit d'une teinte qu'il sait détecter sans problème.