mardi 29 avril 2014

L'état français est-il un bon stratège économique et industriel ?

Régulièrement depuis Colbert - Alstom est le dernier avatar en date - les gouvernements français de gauche et de droite nous expliquent qu'une des vocations de l'état est d'être un stratège entrepreneurial doté d'une politique industrielle afin d'accroître l'emploi et la prospérité économique dans notre bel hexagone.

Dans le même temps, quelques rares économistes et chefs d'entreprise dits libéraux clament que l'état aurait meilleure part à s'occuper de ses oignons, c'est à dire des affaires régaliennes et laisser le libre marché faire son œuvre salvatrice.

Ne goûtant guère les dogmes et les écoles de pensée, j'ai cherché, selon l'habitude de ce blog, à juger sur pièces et à laisser le lecteur tirer ses propres conclusions.
Pour ce faire, j'ai comparé les performances des 32 entreprises françaises figurant parmi les 500 plus grandes firmes mondiales, en fonction du degré d'implication de l'état dans leur gestion, leur carnet de commandes et leurs coûts.

Taille
Malgré les discours ambiants, les entreprises à forte implication étatique sont minoritaires.
Sensiblement, un tiers de grosses boîtes françaises est, peu ou prou, sous ombrelle de l'administration, que ce soit en nombre (10 sur 32) ou en chiffre d'affaire (650 milliards d'euros sur 1 600).

Chiffre d'affaire 2013 des 32 plus grandes entreprises françaises en fonction de l'emprise de l'état.

Rentabilité
L'état français, en dépit des dénis la main sur le cœur des gouvernements successifs, reste un piètre gestionnaire et investisseur.
Les firmes où il intervient dégagent 2 fois moins de bénéfices que la moyenne et 3 fois moins que les entreprises non dépendantes de l'action publique.
Ces mauvais chiffres deviennent encore moins flatteurs si l'on soustrait EDF Électricité de France, seule société à très forte emprise étatique avec des résultats honorables.
On notera au passage que les bénéfices des plus grandes boîtes françaises, toutes catégories confondues, ne représentent, en moyenne, que 2.7% de leurs ventes, ce qui n'est ni glorieux, ni excessif.

Rentabilité (bénéfice net / chiffre d'affaire 2013) des 32 plus grandes entreprises françaises en fonction de l'emprise de l'état.

Emploi
Les tenants de la ligne colbertiste argumentent que la rentabilité réduite est la contrepartie d'une stratégie résolument de long terme et d'un accent mis sur l'emploi.
Les chiffres, au premier abord, leur donnent raison. Les firmes où l'état intervient salarient sensiblement 20% de personnel en plus, à taille comparable.
Toutefois, les nuances sont parfois diaboliques. Les 11 entreprises quasiment sans dépendance à l'état font jeu égal dans le domaine de l'emploi avec les champions toutes catégories que sont La Poste, EDF et SNCF.
Cette comparaison n'est hélas pas parfaite. L'état français cherche, en théorie, à privilégier emploi et activité sur son sol. Malheureusement, il n'y a aucune statistique fiable de chiffres d'affaire et de personnels hexagonaux pour les très grandes entreprises.

Ratio employés / chiffre d'affaire des 32 plus grandes entreprises françaises en fonction de l'emprise de l'état.

Libéralo-colbertiquement votre

Références et compléments
- Les 32 entreprises évoquées dans ce déchiffrage sont, par ordre décroissant d'emplois à travers le monde :
Sodexo, Carrefour, Foncière Euris (Rallye), Auchan, La Poste, SNCF, Veolia Environnement, GDF Suez, Peugeot, Saint Gobain, Vinci, BNP Paribas, France Telecom Orange, EDF Électricité de France, Société Générale, EADS Airbus, Schneider Electric, Bouygues, Renault, BPCE Banques Populaires Caisse d'Epargne, Sanofi, Michelin, Danone, Air France KLM, Total, Axa, Christian Dior, Alstom, Crédit Agricole, L'Oréal, Vivendi, CNP Assurances.